L’art poétique de Jean McEwen
Né à Montréal en 1923, Jean McEwen a contribué de manière significative à faire de l’art abstrait une force majeure de la scène québécoise des années ’60 et ’70. Influencé par les automatistes, mais profondément indépendant dans sa recherche créative, McEwen s’est distingué en poursuivant de façon soutenue une exploration de la matière et de la couleur. Ses créations, font état d’une recherche où l’utilisation des textures et des jeux de couleurs est constamment renouvelée et s’adressent d’abord à nos sens, plutôt qu’à notre conscience. Même dans ses compositions les plus symétriques, il y expérimente la sensualité de la couleur, de la lumière et du geste. Ses œuvres sont construites par une accumulation de couches de pigments parfois opaques, parfois translucides. Plusieurs œuvres de la collection du Musée démontrent ses recherches sur les effets de la couleur et l’expérience des sens. Les couches de jaune, de vert ou de rose couvrent les toiles et leur donnent une illusion de profondeur et de fluidité.
Jean McEwen compte aujourd’hui parmi les figures dominantes de sa génération et sa renommée dépasse nos frontières. Plusieurs expositions d’envergure lui ont été consacrées et ses œuvres se retrouvent dans les collections des principaux musées d’art du pays. Jean McEwen est décédé le 9 janvier 1999 à Montréal.
Jean McEwen
1923 – 1999
« Il y a deux façons de juger un tableau… L’une est fondée sur les critères et les théories de l’art. L’autre repose sur les sensations que suscite en nous le tableau. Je peints de la deuxième façon. »
Jean McEwen, 1956
Jean McEwen souhaite que ses tableaux abstraits, qui comportent de multiples couches de couleurs opaques et translucides, soient une expérience pour le spectateur. McEwen est particulièrement connu pour ses expérimentations dans l’application de la peinture par couche et par versement.
McEwen étudie la pharmacie à l’Université de Montréal, tout en s’intéressant à la poésie et à la peinture. En 1951, à moins d’un an de son diplôme, il décide de poursuivre une carrière comme artiste et découvre bientôt que l’expérimentation et l’expression non représentatives le passionnent. Il est inspiré par les membres automatistes de Montréal, Jean Paul Riopelle et Paul-Émile Borduas, qui croient à une créativité spontanée tirée de l’inconscient. Borduas encourage McEwen à rendre visite à Riopelle qui vit à Paris.
McEwen déménage à Paris en 1951 où il est influencé par le travail de Riopelle, de Jackson Pollock et de Sam Francis. En 1952, il peint dans un style similaire à celui de Riopelle, utilisant un couteau pour créer des effets de pleine surface, une méthode qu’il abandonnera plus tard quand il commencera à travailler avec les doigts.
À compter de 1957, McEwen travaille à une succession de séries expérimentales centrées sur la création d’un espace dynamique et plat par l’exploration des différentes qualités de la couleur. Ces œuvres n’évoquent en rien la nature, mais considèrent le rapport de la structure du tableau à sa couleur. Elles sont constituées par une stratification de pigments opaques et translucides.Entrelacements rouges (1961) est un exemple de sa recherche sur les effets sensuels de la couleur et l’expérience de la sensation pure. Les couches de rouge, de jaune et de brun couvrent la toile et lui donnent une sensation de profondeur et de fluidité.
Ses tableaux tardifs sont centrés sur un fort plan vertical qui intègre les différentes sections de l’image en un tout. McEwen comprend cette division comme la captation de la lumière dans deux sections par la variation de l’opacité des couleurs. Quoique le principal médium de l’artiste soit la peinture, il a également créé une série de livres d’artistes et un groupe de vitraux à l’Université Concordia de Montréal. Il a beaucoup exposé jusqu’à sa mort.