Natif de Loretteville, Jean-Guy Barbeau s’établit à Chicoutimi en 1951. Diplômé de l’École des Beaux-Arts de Québec, il a enseigné les arts plastiques pendant 25 ans à la Commission scolaire de Chicoutimi et assumé des charges de cours à l’Université du Québec à Chicoutimi. Il fait partie des pionniers de l’enseignement des arts au Saguenay auprès de Pierrette Gaudreault, fondatrice de l’Institut des arts à Jonquière, tout en poursuivant sa propre quête dans son atelier de la rue Mélançon.
Son œuvre, trop peu connue du public québécois, a rayonné du Québec jusqu’en Europe. Il fut le premier peintre canadien à exposer en solo en Pologne en 1976, à la galerie d’art contemporain Bwa Katowice et en Hongrie.
En 2008, Jean-Guy Barbeau devient le tout premier récipiendaire du Prix pour la reconnaissance de l’excellence, la plus haute distinction remise par le Conseil des arts de Saguenay pour souligner l’implication d’une personne dans les domaines des arts et de la culture. Jean-Guy Barbeau a reçu cet honneur pour son œuvre, son importance au Québec et à l’international, pour son rapport avec l’histoire de la culture et pour être l’exemple type d’un artiste qui a choisi de faire carrière au Saguenay.
Émule de grands maîtres de la peinture, sensible à l’audace des autres, le parcours de ce peintre inclut de nombreuses tendances, allant du tachisme à l’abstrait, du fauvisme au cubisme. Des explorations d’où il est revenu avec un style bien à lui, un style qui lui survit et fait écho à des œuvres futures. L’art de Jean-Guy Barbeau est intemporel. Que l’œil prenne plaisir à plonger dans les jeux géométriques de ses compositions, surfant sur les transparences savamment brossées par couches superposées, n’exclut pas une sensibilité attentive aux grandes préoccupations de son temps. Chantre de la femme certes, mais pas seulement cela. Certains de ses tableaux évoquent les conflits guerriers, la douleur humaine; d’autres racontent notre passé. Il est l’auteur d’une imposante murale de plus de 278 mètres carrés réalisée pour la Maison de la presse inaugurée en 1980, laquelle résume les grands moments de l’histoire de la région.
Une grande rétrospective de ses œuvres a été présentée en avril 2007 à La Pulperie de Chicoutimi. Il a pu entendre et voir l’amour et l’admiration de ceux qui ont été ses élèves, ses compagnons, ses amis, tous éblouis par un maître qui n’a rien imposé aux autres sinon sa propre ferveur à atteindre l’absolu dans la forme et la couleur. Une œuvre qui nous émeut, comme l’homme qu’il était, bien au-delà du temps!
Luca Fortin est actuellement candidat à la maîtrise professionnelle en architecture et complète à l’été 2015 le microprogramme de deuxième cycle en création de livre d’artiste à l’Université Laval. Son parcours est reconnu par sa nomination comme médaillé du Lieutenant-gouverneur du Québec pour la jeunesse (2008); La fondation du millénaire du gouvernement du canada (2009); La fondation W. Garfield Weston (2009); The Loran Award Foundation (2010); Forces Avenir au collégial (2011) ainsi que par l’Université Laval qui lui remet une bourse de leadership artistique en 2014. Ses œuvres font partie de la collection Loto-Québec ainsi que de plusieurs collections privées.
Originaire d’Alma, vivant entre Québec et Saint-Gédéon. Représenté par la Galerie la Corniche.
Luca Fortin – démarche
Mes œuvres puisent leur inspiration en parallèle à mes recherches architecturales. Je souhaite mettre en évidence ces contrastes quotidiens qui nous entourent que sont la mort et la vie; la présence et l’absence; le vrai et le faux. Je veux faire vivre au regardeur une expérience de corps à corps avec un monde où la prédominance d’une atmosphère éthérée donne lieu à des flous, des fondus et où l’absence de repères me permet d’osciller entre la composition et la décomposition de l’espace. Cette idée d’assister à quelque chose qui est en train de se modifier et d’évoluer est centrale à mon exploration matérielle. Mes récentes recherches tendent vers une hybridité entre techniques traditionnelles et outils numériques où je passe de l’un à l’autre afin de générer des formes qui sont ensuite déformées par ce même processus de création d’image. Je joue ainsi avec l’échelle des objets dans le but de créer des ambiguïtés visuelles qui invitent à se questionner sur ce qui se trouve entre l’un et l’autre, entre la réalité et la fiction, entre le physique et l’impalpable.
Né à Montréal, Wilfred Barnes étudie avec William Brymner, Maurice Cullen et Edmond Dyonnet au sein de l’Association des arts de Montréal. Il déménage à New-York pour étudier à la Chase School sous William Chase, Kenneth Hayes Miller, et Robert Henri. Il a aussi étudié à l’Art Students’ League sous Frank Vincent Drummond avant de revenir à Montréal en 1905. Il a fondé la Barnes School of Art. Ses paysages sont réalistes, romantiques. Il peint à l’huile, à l’aquarelle et au pastel. Il voyage pour peindre au Vermont, New-Hampshire, en Estrie et en Nouvelle-Écosse.
Il a exposé avec le groupe de l’Académie Royale Canadienne de 1904-1948.
Charles Huot sera le premier artiste a être admis à l’atelier d’un grand académicien français, Alexandre Cabanel, est né à Québec en 1855. Peintre éclectique, il a décoré plusieurs lieux de culte, dont la Chapelle de l’Ermitage dédiée à Saint-Antoine-de-Padoue du Lac Bouchette, mais il est surtout reconnu pour ses toiles murales, tel que Le débats sur les langues de l’Assemblée Nationale du Québec.
Coloriste né, Charles Edouard Huot, dessinateur habile dont bien des critiques et collectionneurs ont su depuis toujours admirer l’imagination teintée de bonhommie, parfois chargée d’élan romantiques, on le retrouve pleinement dans ses scènes de la vie des saints.
Charles Huot, artite
Réf.: Jean-René Ostiguy
Le Palais législatif
La préparation de cette étude a été grandement facilitée par l’étroite collaboration du Bureau d’accueil et d’information à l’Assemblée nationale du Québec, et par celle de Simone P. Huot, nièce de l’artiste. Le soutien constant du Centre de recherche en civilisation canadienne-française, gardien du fonds Charles Huot, nous fut d’un grand secours. Nous sommes également redevables au personnel de l’Inventaire des biens culturels, du Musée du Québec et des Archives nationales du Québec, ainsi qu’à nos collègues de la Galerie nationale du Canada. Que tous ceux qui ne sont pas spécifiquement mentionnés dans nos notes trouvent ici l’expression de notre plus profonde gratitude.
Introduction
Le 11 novembre 1913 était inaugurée l’oeuvre qui rendrait célèbre le peintre québécois Charles Huot (1855-1930), alors au faîte de sa carrière. Ce tableau décore aujourd’hui la salle des délibérations de l’Assemblée nationale du Québec (voir fig. 18). L’artiste y suggère une reconstitution historique de la séance du 21 janvier 1793 de l’Assemblée législative du Bas-Canada, formée l’année précédente en vertu de l’Acte constitutionnel de 1791. On y décrit cet instant dramatique où les députés eurent à se prononcer sur l’amendement de John Richardson à l’effet que « l’anglais sera considéré le texte légal ». Porte-parole des élites intellectuelles et politiques du Québec en ce début du XXe siècle, Huot transposait en une création picturale l’essence même de leur pensée. Ayant satisfait à leurs exigences, on le remercia, en plus de le payer grassement, en le gratifiant du titre de peintre national. Sa gloire était dorénavant assurée par ce tableau qui demeure sans contredit un chef-d’oeuvre. D’emblée, cette murale avait cristallisé diverses tendances de l’art québécois en gestation depuis une trentaine d’années. Par sa réalisation, elle marquait un jalon essentiel du programme de décoration picturale du Palais législatif amorcé en 1883.
I. La décoration du Palais législatif
Avant de parler de décoration picturale, il sied de connaître l’édifice qui l’a reçue. L’historique des immeubles publics où logea le gouvernement québécois est particulièrement mouvementé: incendies, démolitions et déménagements le jalonnent. (1) Le pouvoir politique siégeait au Château Saint-Louis. Mais les besoins immobiliers du gouvernement, aigus, l’amenèrent à louer divers bâtiments dont le Palais épiscopal en 1777. Avec l’avènement du gouvernement représentatif en 1792, la chapelle servirait de salle des délibérations pour l’Assemblée législative. Finalement acquis en 1831, le gouvernement entreprend aussitôt d’agrandir l’édifice d’une aile. Sur le site de la chapelle on érige en 1833 le corps central de l’Hôtel du Parlement d’après les plans de Louis-Thomas Berlinguet (voir fig. I). En 1850 on démolit l’aile restante du Palais épiscopal et on achève la construction de l’Hôtel du Parlement, entre 1851 et 1852, d’après les plans de Pierre Gauvreau et George R. Browne. En 1854 l’édifice brûle. Logés chez les Soeurs de la Charité, les bureaux du gouvernement sont de nouveau la proie des flammes. En 1859-1860 on construit un nouvel édifice sur l’emplacement actuel du parc Montmorency. D’une architecture banale, celui-ci fut également incendié, en 1883, alors qu’on s’affairait à construire le Palais législatif actuel.
Quand on considère cette énumération de catastrophes et qu’on lui ajoute les déménagements successifs du siège du Parlement sous l’Union, (2) sans compter l’incendie dévastateur de Montréal en 1849, il n’est pas surprenant de constater que l’on ne connaisse pratiquement rien des décors intérieurs de ces édifices, qui ont péri avec nombre de biens culturels (archives, bibliothèques et musées inestimables). Une seule description, faite en 1852, nous permet d’évaluer sa décoration picturale. (3) Cependant, nous sommes beaucoup mieux renseignés sur l’actuel Hôtel du Gouvernement. Son architecte est Eugène-Etienne Taché. Ardent nationaliste, il s’inscrit dans le mouvement initié par l’historien François-Xavier Garneau qui avait publié son Histoire du Canada…en réponse à une boutade du rapport Durham à l’effet que les Canadiens étaient « sans histoire ni littérature ». (4) Taché illustrerait l’histoire de son pays par la décoration et l’architecture du Palais législatif; dont il voulait faire un panthéon. L’embellissement des édifices parlementaires rendrait donc hommage à nos gloires nationales tant par la sculpture que la peinture. Le tout serait couronné par la nouvelle devise du Québec, « Je me souviens », qui apparaît pour la première fois dans les plans et devis préparés par Taché. (5) En 1877 on s’attaqua à la construction des trois ailes affectées aux départements publics (les ministères actuels). Ces bureaux furent occupés dès 1880. Les fondations de la quatrième aile, le Palais législatif avec sa tour centrale, furent entreprises en 1881. On posa la pierre angulaire de cet edifice le juin 1884. (6) L’ensemble des travaux ne fut termine qu’en 1886.
Dès 1883 Napoléon Bourassa avait soumis un projet été détaillé de décoration intérieure et extérieure, dont il résumait ainsi la finalité: « ouvrir un champ digne et enviable à l’art national, […] consacrer, dans une oeuvre méritoire et durable, la mémoire des hommes et des faits glorieux de notre histoire. » L’artiste aurait fut ainsi réaliser sa « vieille ambition: celle d’établir ici l’art sur cette double base du culte religieux et du culte national. » (7) Bourassa était sans contredit un des candidats les mieux préparés pour la réalisation de cette tâche. Il avait acquis son expérience par la conception et la réalisation de deux grands ensembles décoratifs, la chapelle de Nazareth (1870-1872) et la chapelle de Notre-Dame-de-Lourdes (1873-1884). (8) Il s’était aussi attaqué, en 1859, à une composition historique d’envergure destinée au Cabinet de lecture paroissial de Montréal et intitulée L’Apothéose de Christophe Colomb. (9) Le contrat ne fut jamais réalisé malgré un nouvel espoir également infructueux en 1865. Désabusé de cet échec, le peintre confia son carton à Joseph-Charles Taché, commissaire du Canada à l’Exposition internationale de Paris, qui l’y fit exposer en 1867. L’Apothéose…en revint avarié pour demeurer oublié jusqu’à ce que Bourassa en fasse le principal item de son projet de décoration pour le Palais législatif. Le Musée du Québec conserve cette esquisse réalisée entre 1859 et 1865, plusieurs dessins préparatoires et une huile de grandes dimensions (voir fig. 2). On conserve une autre composition historiquede Bourassa, Le Naufrage de l’Auguste (fig. 3), également proposée pour la décoration du Palais législatif. (10) Malgré son religieux patriotisme, Bourassa ne parvint pas à faire vibrer les politiciens à cette peinture d’histoire, somme toute assez peu nationaliste. Il est cependant intéressant de souligner les sujets proposés dans la mémoire de Bourassa qui eurent une grande influence sur ses successeurs. L’imagination stimulée par l’espoir d’un contrat gouvernmental, plusieurs artistes n’auront de cesse d’exploiter ces sujets historiques que lorsque la décoration du Palais législatif aura été complétée, ou donnée à contrat ferme à l’un d’eux. « La visite de Jacques Cartier à la bourgarde d’Hochelaga » inspirera Eugène Hamel (voir fig. 5) et Marc-Aurèle de Foy Suzor-Coté (voir fig. 8); « La défense du fort de
Verchères » fut repris par Huot, Suzor-Coté et le sculpteur Philippe Hébert; (11) « La défense héroïque de Dollard au Long Sault » sera peinte par Suzor-Coté (12) et Charles Huot, (13) tandis que Joseph Saint-Charles en réalisera une version pour la chapelle du Sacré-Coeur (église Notre-Dame de Montréal); (14)
« La mort de Montgomery à l’assaut de la barrière Près-de-Ville »,L’Apthéose…et Le Naufrage…eurent moins de succès. Alors que Philippe Hébert, le protégé de Bourassa, se voit confier la réalisation d’une dizaine de sculptures pour la façade, (15) E. É. Taché désire remplir les encadrements vides destinés à recevoir des oeuvres picturales. Eugène Hamel, revenu de Rome en 1885, a déjà préparé une esquisse: « Nous avons remarqué, dans l’atelier de M. Hamel, une esquisse historique d’un grand intérêt, c’est la réception de Jacques Cartier à Montréeal, par le chef de la bourgarde d’Hochelaga. Le sujet est tiré de Garneau. C’est saissant de vérité. […] Nous engageons fortement le gouvernement à confier M. Hamel la décoration des salles du nouveau parlement. » (16)
Goodridge Roberts, O.C., peintre (né le 24 septembre 1904 à la Barbade aux Antilles britanniques, décédé le 28 janvier 1974 à Montréal au QC). Goodridge Roberts fait partie d’une grande famille de poètes et d’écrivains à Fredericton, au Nouveau-Brunswick dont son père Théodore, son oncle Sir C.G.D. Roberts et son cousin Bliss Carman.
Goodridge Roberts, O.C., peintre (né le 24 septembre 1904 à la Barbade aux Antilles britanniques, décédé le 28 janvier 1974 àMontréal au QC). Goodridge Roberts fait partie d’une grande famille de poètes et d’écrivains à Fredericton, au Nouveau-Brunswick dont son père Théodore, son oncle Sir C.G.D. Roberts et son cousin Bliss Carman. En 1952, il est l’un des quatre artistes à représenter le Canada dont c’est la première participation officielle à la Biennale de Venise et il reçoit une des premières bourses de la Société royale du Canadapour aller peindre en Europe. Goodridge Roberts, officier de l’Ordre du Canada, est parmi les premiers peintres canadiens à accorder une même importance au paysage, à la forme et aux natures mortes.
Études et début de carrière
Goodridge Roberts est formé à l’École des beaux-arts de Montréal de 1923 à 1925 et grâce au soutien de sa tante Mary Fanton Roberts, rédactrice en chef new-yorkaise et critique artistique, il s’inscrit à l’Art Students League de New York qu’il fréquente de 1926 à 1928. En prenant des cours avec le peintre américain John Sloan, le fondateur de l’Ashcan School, Goodridge Roberts commence un engagement de toute une vie envers le modernisme. Lorsqu’il déménage à Ottawa en 1930, il tient sa première exposition solo, un évènement annuel qui se poursuivra jusqu’à la fin des années 1960. Il devient ensuite le premier artiste résident à être parrainé par la société Carnegie à l’Université Queen’s (1933 à 1936). Par la suite, il s’installe à Montréal où il demeure une grande partie de sa vie et prend souvent part à des expositions locales et nationales, une habitude qu’il gardera durant sa longue carrière. En 1937, ses œuvres font l’objet d’une première exposition internationale à Londres. Puis, il participe de manière fréquente à des expositions collectives d’art canadien aux États-Unis et en Europe. Un an plus tard, il joint le groupe de l’Est de John Lymanqui sera de courte durée. En 1939, il devient l’un des membres fondateurs de la Société d’art contemporain de Lyman.
Style mature
Avec ses aquarelles, Goodridge Roberts expose ses œuvres sur toile, en particulier les autoportraits et les images de sa première femme Marian qui posera pour bon nombre de ses peintures nues et habillées. Il produit aussi des images de ses jeunes cousins reflétant ainsi un intérêt particulier que Montréal montre pour les peintures d’enfants. Le fait d’entremêler l’éloignement et l’immédiateté dans ses images autonomes, presque austères du corps, reste une constante tout au long de sa carrière, peu importe le sujet ou le modèle.
Tout en peignant le paysage placide du Québec, il continue à s’intéresser à la ville, surtout à travers des images simplifiées des façades des magnifiques bâtiments du Vieux-Montréal en fin d’après-midi. Il fait aussi de l’imagerie de natures mortes un thème important, car il exerce un contrôle total sur le choix et l’agencement des divers éléments tout en gardant un sens objectif de l’authenticité, une chose qu’il ne peut faire avec les images de gens ou de lieux. À cette époque, il commence un long mandat à l’Art Association of Montreal’s School of Art and Design qui durera de 1940 à 1949, aussi en 1952, sauf lorsqu’il sert comme artiste de guerre de 1943 à 1945. Sa plus grande compétence en enseignement se résume à son dévouement pour sa peinture et au modèle à suivre qu’il représente, ce qui aura une très grande influence sur beaucoup de ses étudiants, y compris Jacques de Tonnancour (qui publiera la première monographie sur Goodridge Roberts en 1944), John Fox et Paterson Ewen. Des décennies plus tard, grâce à l’intérêt que le critique américain Clement Greenberg portera à son œuvre, la peinture de Goodridge Roberts attire une jeune génération d’artistes canadiens, surtout dans les Prairies.
Fin de carrière
Au début des années 1950, Goodridge Roberts acquiert une notoriété nationale grâce à sa participation régulière à de nombreuses expositions au Canada et à l’étranger, et grâce à l’accueil très favorable qu’il reçoit de la presse française et anglaise de Montréal et des magazines canadiens. Bien que les Laurentides puis les Cantons de l’Est du Québec (ainsi que le Mont-Royal de Montréal) inspirent le cadre tranquille d’une grande partie de ses images de paysages, il commence alors à peindre la rive nord plus accidentée du Saint-Laurent, les terrains difficiles du sud-ouest du Québec et la baie Georgienne très austère. En raison des liens que sa deuxième femme a dans l’Ontario, Goodridge Roberts y retourne presque chaque année et peint une série de paysages imposant sa propre personnalité sur ce site trop familier. Ces changements de lieux et de topographies incitent à un coup de pinceau plus énergique, à des formes moins contenues et à une composition réinventée mettant plus l’accent sur le ciel pour façonner l’espace pictural. De plus, ses images de natures mortes sont souvent remplacées par des images d’intérieurs où la pièce elle-même décrit la même vérité d’observation que les objets représentés sur le tableau. Sur ses peintures les plus expérimentales de la fin des années 1950, les intérieurs continuent à fonctionner comme une forme d’autoportrait alors que le sujet représente l’endroit où il peint et les objets qu’il possède. Il produit aussi des séries de nus monumentaux où le contrôle gestuel du corps posé et le regard direct intensifient la présence physique du personnage.
Vers la dernière décennie, les peintures de Goodridge Roberts révèlent des couleurs plus intenses, des espaces picturaux plus ouverts, des formes moins closes et moins ressemblantes à des silhouettes, une manipulation plus intense des matériaux. Le traitement qu’il réserve à ses thèmes de prédilection devient une sorte de métaphore de la peinture plutôt qu’un indice de ce qu’il peint.
Postérité
Malgré un intérêt croissant pour l’art non figuratif à Montréal dans les années 1950, l’autorité de Goodridge Roberts demeure évidente dans les écrits critiques de Robert Ayre et de Rodolphe de Repentigny, et dans le respect qu’il gagne d’autres artistes, y compris des abstractionnistes québécois comme Jean-Paul Riopelle et Paul-Émile Borduas. Il est élu membre à part entière de l’Académie royale du Canada en 1957, et deux ans plus tard, il devient le premier artiste résident à l’Université du Nouveau-Brunswick, avec une rétrospective à la nouvelle Galerie d’art Beaverbrook en 1960. En 1969, il reçoit l’Ordre du Canada et la Galerie nationale du Canada lui offre une exposition rétrospective itinérante, un honneur rare pour un artiste encore en vie à cette époque. Après sa mort survenue suite à une longue maladie, ses œuvres font l’objet de plusieurs expositions solos avec publications dans plusieurs musées, y compris une tournée rétrospective en 1998. Plus récemment, Joan Roberts a écrit un mémoire sur leur vie commune.